Chronique – Les disparus de Blackmore d’Henri Loevenbruck
Polar historique, Fantastique
LECTURE AUDIO – Roman lu par Stéphane Ronchewski
Date de lecture : 30 avril – 3 mai 2023
Voici un polar historique qui m’a fait passer un excellent moment de lecture. C’est le troisième roman que je lis de l’auteur, et chaque fois je suis complètement captivée par l’histoire qu’il me présente. D’ailleurs, je suis admirative de l’aisance avec laquelle Henri Loevenbruck navigue entre les genres. Les trois romans que j’ai lus sont totalement différents, et pourtant tous trois remarquables à bien des égards. Quel talent !
L’intrigue se déroule au début des années 20, dans une atmosphère mystérieuse à souhait. Imaginez une île en plein mois d’octobre, sur laquelle disparitions et morts étranges se succèdent. Imaginez une brume qui obscurcit l’horizon, des habitants taiseux, un sanatorium malaisant, des yeux sans lueur et d’obscures légendes… Voici ce qui vous attend sur l’île de Blackmore !
Lorraine Chapelle, jeune criminologue française, se rend sur l’île de Blackmore à la rencontre de Sir Waldon, un homme que sa mère a connu autrefois. Désemparé par la disparition de sa petite-fille Margaret, et insatisfait des investigations de la police locale, ce dernier sollicite son aide pour élucider l’affaire. D’autant que, fait étrange, la disparition de Margaret est loin d’être un cas isolé et fait partie d’une série qui ne semble pas près de s’achever. Des disparitions également à l’origine de la venue sur l’île d’Edward Pierce, détective de l’étrange. Les deux enquêteurs vont devoir oeuvrer de concert et conjuguer leurs talents “afin d’expliquer l’inexplicable” et mettre un terme à cette série noire.
Ce roman avait tout pour me plaire, du titre en passant par le scenario, le décor, l’intrigue et les protagonistes, aussi mon intérêt s’est éveillé dès les premières minutes. Des protagonistes à la personnalité aussi dissemblable qu’attachante. Edward et Lorraine, ce sont un peu des Mulder et Scully avant l’heure. Lui est aussi fasciné par l’inexplicable qu’elle a l’esprit rationnel, alors forcément, cela donne lieu à des répliques exquises et quelques situations cocasses. Des personnages comme on en rencontre peu dans les polars historiques.
« Pas plus qu’elle ne donnait à voir ses sentiments, Lorraine était de ces personnes dont la voix n’est teintée d’aucune variation tonale, d’aucune amplitude, si bien qu’elles semblent être tout le temps d’une même humeur morne et sombre. Beaucoup y lisaient la marque du dédain, de la froideur ou de la suffisance, là où en réalité se cachait la retenue d’une âme d’observatrice, mesurée et réfléchie. Si Mlle Chapelle était pleine d’assurance, elle n’en faisait jamais un étalage tapageur. Simplement, la courtoisie soumise de sa gent lui était devenue insupportable : Lorraine était une amazone qui parlait aux hommes comme à ses égaux, et soutenait leur regard avec un soupçon de défi, prête à décocher sa flèche au moindre faux pas. »
Lorraine est une féministe, à la répartie cinglante et à la franchise sans borne. Un peu trop parfois, au grand amusement d’Edward, qui lui est un véritable gentleman anglais, comme le démontre ses manières distinguées et le parapluie bleu dont il ne se sépare jamais. Cela dit, il ne faut jamais sous-estimer un accessoire, aussi innocent soit-il, il n’y a qu’à se souvenir du parapluie dans « Kingsman »1 ! J’ai beaucoup aimé cette jeune femme, passionnée de moto, réfléchie et brillante, qui désarmera – au sens propre comme au figuré – plus d’un homme au cours du récit. Mais j’avoue avoir eu un petit faible supplémentaire pour Edward, sa fraîcheur, son humour et son ouverture d’esprit. Un duo attachant que l’on retrouvera, je l’espère, dans beaucoup d’autres romans.
« Lorraine reconnut aussitôt le passager qu’elle avait aperçu à bord du SS Courrier, non pas tant grâce à sa splendide moustache qu’au long parapluie bleu à manche doré qu’il tenait dans la main d’une manière si naturelle qu’on eût dit un prolongement de son bras.
Ce que Mlle Chapelle ignorait, à cet instant, c’était qu’elle n’était pas si loin de la vérité, car s’il y avait une chose dont le détective Edward Pierce ne se séparait en aucune circonstance, c’était bel et bien de ce fameux parapluie bleu. »
Quant à l’intrigue, elle m’a conquise ! Elle est palpitante, bien rythmée, et j’ai pris plaisir à la suivre jusqu’à la fin. Les derniers chapitres m’ont fait penser à du “Indiana Jones”. Oui, j’ose la comparaison, après tout, c’est ma chronique.
Mon avis sur la version audio :
Par ailleurs, je tiens également à souligner l’efficacité de la version audio Lizzie, lue par Stéphane Ronchewski, qui m’a complètement transportée. J’ai eu un coup de coeur pour cette écoute, tant pour l’histoire que pour l’interprétation du comédien. Pour être honnête, j’aimais déjà beaucoup la voix de Stéphane Ronchewski en tant que doubleur – Luka Kovac dans Urgences, Alec Hardy dans Broadchurch, entre autres – mais c’est la première fois que je l’écoutais en tant que narrateur et je l’ai trouvé formidable. Pour conclure, un polar historique captivant et une merveilleuse écoute !
Et comme les mots peuvent sembler parfois bien fades, rien de mieux qu’écouter un extrait pour se faire un avis.
1. Film de Matthew Vaughn, Kingsman : Services Secrets, 2015.
Extrait
« Détective de l’étrange ? lut-elle à voix haute en l’interrogeant du regard.
Pierce sourit en s’appuyant de ses deux mains sur son parapluie bleu.
— Il y a deux ans, après un étonnant voyage qui m’a mené jusqu’à Constantinople, en compagnie du père Molloy, justement, j’ai décidé de me spécialiser quelque peu. Mon agence de Canterbury ne traite désormais plus que des affaires liées à… l’inexplicable. Les sciences occultes, dirons-nous.
Lorraine fit une moue sceptique, presque déçue.
— Les sciences occultes ?
— Au sens large, oui.
— Les deux mots sont parfaitement contradictoires.
— La contradiction n’est-elle pas le meilleur moteur de la réflexion, laquelle mène alors à la connaissance ? répliqua Pierce, espiègle.
— Allons, monsieur ! La science et l’occultisme sont le fruit de démarches diamétralement opposées, qui ne peuvent coexister, lâcha Lorraine avec une pointe d’agacement dans la voix. La première tente d’expliquer l’univers et ses lois par des hypothèses qu’elle confronte à la méthode expérimentale, la seconde s’efforce de le rendre aussi mystérieux que possible, en s’affranchissant de toute démonstration empirique. »
Infos et Quatrième de couverture
Les disparus de Blackmore d’Henri Loevenbruck
Édition audio : Lizzie – Parution : 13/04/2023 – Durée : 12h45min – ISBN/ASIN: 9791036627484 – Lu par : Stéphane Ronchewski – Genre : Polar historique.
Un thriller palpitant et mystérieux dans la lignée de H.P. Lovecraft et d’Agatha Christie
Octobre 1925.
À Blackmore, une île coupée du monde au large de Guernesey, meurtres et disparitions sèment la terreur. Alors que la police piétine, Lorraine Chapelle, première femme diplômée de l’Institut de criminologie de Paris, est appelée en renfort. Cette cartésienne irréductible va devoir mener l’enquête aux côtés d’Edward Pierce, un Britannique spécialisé dans les sciences occultes qui se présente comme « détective de l’étrange ».
Ensemble, ils affrontent les plus sombres secrets de Blackmore : les statues énigmatiques disséminées sur l’île, la rumeur d’un culte maléfique qui sévirait dans l’ombre, et ce vent lancinant, le murmure des brumes, qui ne cesse jamais. Entre mensonges et confidences, ce duo improbable devra démêler le vrai du faux dans une course contre la montre diabolique.
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Il est tentant de base mais ta chronique enfonce le clou !
Je suis désolée Nath, je viens de voir ton commentaire, totalement par hasard, en mettant cette chronique en avant sur le blog. Alors, si tu ne l’as pas déjà lu et qu’il te tente toujours, sache qu’il sort en poche le 24. 😉
0h, je dois avouer que je ne sais même plus si je l’ai déjà en grand format ou pas 🙈
(Mais par contre, faut pas être désolée, il n’y a rien de grave 😄😘)
Un sanatorium et des légendes obscures, voilà deux éléments qui me bottent bien ! Henri Loevenbruck est un auteur qui me tente beaucoup, j’ai d’ailleurs « Nous rêvions juste de liberté » dans ma pile à lire, j’attends d’être un peu plus assidue dans mes lectures pour me lancer et apprécier tout son travail. Car j’en lis toujours beaucoup de bien. ☺️ Ce roman a l’air chouette aussi ! Et comme j’aime beaucoup Mulder et Scully, les personnages devraient me plaire aussi. 😉 Merci pour ton retour Caroline.
Ce qu’il y a de chouette avec cet auteur, c’est que tu peux facilement trouver un roman qui te convienne, en fonction de tes préférences. « Nous rêvions juste de liberté » avait été un coup de coeur. 😊
Oui, l’auteur semble être très bon dans plusieurs domaines, c’est d’autant plus intriguant ☺️ J’espère partager cette impression alors 😃
Eh bien, encore un roman que tu me donnes très envie de découvrir !
J’ai Nous rêvions juste de liberté, de l’auteur, dans ma PAL. Du coup, je verrai si j’accroche à son écriture avant de craquer pour ses autres livres, mais je garde celui-ci en tête 🙂
Oh ben mince, je viens juste de voir ton commentaire ! Depuis, j’ai vu que tu as lu et beaucoup aimé « Nous rêvions juste de liberté ». 😁 Comme je te l’ai dit, ce livre a été un coup de cœur mais « Les disparus de Blackmore » n’ont rien à voir. Nous sommes vraiment dans un autre registre et pourtant, j’ai adoré ce livre ! j’espère que tu auras envie de le découvrir.
Tu parles divinement bien de ce roman que j’ai adoré ! Je n’y avais pas pensé mais tu as raison, notre duo c’est Mulder et Scully avant l’heure 🙂
En tant que fan d’X Files, ça m’a frappée direct ! 😂 Après, ce n’est sûrement pas voulu par l’auteur mais j’aime l’idée que ça puisse être le cas, comme un clin d’oeil. En tout cas, cette écoute me laisse un super souvenir !