Soeurs de Bernard Minier
Policier
Martin Servaz, tome 5
Date de lecture : 10-11 juil. 2025
« Ce qu’elles aimaient, c’est que les coupables s’en tiraient souvent et que les victimes n’étaient jamais complètement innocentes. Surtout, il régnait dans ses romans une atmosphère décadente ; tous ses personnages étaient mus par des pulsions morbides, des mobiles sordides et des perversions très créatives. Et, bien entendu, il y avait le sexe. »
« Soeurs » nous emmène sur les traces de deux affaires criminelles, l’une ayant eu lieu dans les années quatre-vingt-dix, l’autre de nos jours. Une double temporalité, avec quasiment les mêmes protagonistes en scène, Martin Servaz et Erik Lang, un écrivain de polars névrosé et mégalo. Il y a vingt-cinq ans, ce dernier s’est retrouvé dans de sales draps suite à la découverte de deux jeunes filles assassinées, vêtues de robes de communiantes. Aujourd’hui, la mort de sa femme, dans des circonstances atroces, conduit Servaz à creuser plus en amont dans la vie de l’écrivain.
« — C’est pas une affaire banale, poursuivit Espérandieu. On a retrouvé la femme étendue au milieu de… serpents venimeux. C’est la panique là-bas, apparemment ils se sont échappés de leurs cages et ça grouille de reptiles. »
J’ai beaucoup aimé la construction du récit, l’habile alternance des époques, qui donne de la vigueur à la narration. J’ai aimé découvrir l’enquête autour des « communiantes », qui nous plonge dans un passé où les méthodes policières et les outils à disposition étaient différents. C’est peut-être aussi pour cela que j’ai trouvé le rythme plus lent, puisque les flics sont obligés eux-mêmes de faire preuve de patience, pour les résultats d’analyse, pour communiquer, etc.
Par ailleurs, j’ai vraiment apprécié découvrir les premiers pas de Servaz dans la police, lui qui a fait des études de Lettres, et sur qui personne n’aurait parié qu’il supporterait le métier de flic. À commencer par Léo Kowalski, son chef de groupe, un homme aux méthodes peu conventionnelles. Mais bon, autres temps, autres mœurs…
Je le dis souvent, Martin Servaz est un personnage de roman policier que j’aime beaucoup, et ils sont assez peu à avoir conquis mon coeur (Wallander, Adamsberg, Longmire). Servaz est assez loin des clichés du genre, bourrus, alcooliques et blasés, même s’il traîne aussi ses fardeaux, comme la plupart des gens.
C’est sans doute ce qui le rend si attachant. J’aime sa culture littéraire et musicale, son côté un peu « vieillot », un peu en marge de son temps. Il est parfois économe de mots, mais je crois que c’est un trait de caractère qu’on peut retrouver chez tous mes enquêteurs favoris.
« Soeurs » est encore une très bonne enquête de Martin Servaz , et c’est chaque fois un plaisir de retrouver le style de Bernard Minier. J’avais lu le précédent tome de la série quasiment en apnée, tellement la tension y était présente. Dans celui-ci, le rythme est plus posé mais l’enquête tout aussi captivante. À vrai dire, j’ai trouvé ce tome plus « reposant », si tant est qu’on puisse qualifier ainsi un roman à l’intrigue aussi sombre. Il faut dire que les aventures de Martin Servaz mettent souvent à mal mon petit coeur, alors j’ai apprécié le répit.
Extrait
« Le poison de ces lignes agissait lentement mais, au bout d’un moment, il se sentit pris au piège de ces images et des pensées de l’auteur comme s’il était englué dans une toile d’araignée, alors même que l’araignée demeurait invisible. En les lisant, il avait parfois la sensation de tâtonner dans le tréfonds glissant d’une âme dégoûtante. Car ce que racontait Lang, tout autant que sa façon de le raconter, était répugnant. Ce n’était pas tant les meurtres qu’il décrivait avec force détails complaisants, ni même les motivations sordides de ses personnages – avidité, jalousie, haine, vengeance, folie, névroses –, mais l’atmosphère lugubre, la voix de l’auteur qui sortait de la nuit pour lui parler dans l’oreille et le triomphe presque constant, à la fin, du mal sur le bien. »
Infos & Quatrième de couverture
Martin Servaz, tome 5 : Soeurs de Bernard Minier
Éditeur : Xo – Parution : 05/04/2018 – 480 pages – ISBN: 9782374480343.
Également disponible : 🎧 En audio chez Audiolib, 2018 ; 📕 En poche chez Pocket, 2019.
Mai 1993. Deux sœurs sont retrouvées mortes en bordure de Garonne. Vêtues de robes de communiantes et attachées à des troncs d’arbres.
C’est la première enquête du jeune Martin Servaz qui vient d’intégrer la PJ de Toulouse. Très vite, il s’intéresse à Erik Lang, auteur de romans policiers à l’œuvre aussi cruelle que dérangeante. Les deux sœurs n’étaient-elles pas ses fans ? L’un de ses plus grands succès ne s’appelle-t-il pas La Communiante ? L’affaire connaît un dénouement inattendu, laissant Servaz rongé par le doute : dans cette enquête, estime-t-il, une pièce manque, une pièce essentielle.
Février 2018. L’écrivain Erik Lang découvre sa femme assassinée… elle aussi vêtue en communiante. Vingt-cinq ans après le double crime, Martin Servaz est rattrapé par l’affaire. Le choc réveille ses premières craintes. Jusqu’à l’obsession.
Une épouse, deux sœurs, trois communiantes… et si l’enquête de 1993 s’était trompée de coupable ?
Série Martin Servaz (Bernard Minier) :
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J’avais beaucoup aimé également… Martin Servaz est vraiment un bon personnage ! Merci pour ta chronique argumentée…
Une de mes séries fétiche que j’ai dévorée cette année. Je partage ta belle analyse du caractère de Servaz. Bonne journée
J’ai fait une très mauvaise expérience de lecture avec cet auteur cet été, avec une autre série, mais je ne pense pas renouveler l’expérience avec celle là, même si on dit quelle est bien meilleure.