Chronique – Il ne se passe jamais rien ici d’Olivier Adam

Il ne se passe jamais rien ici d’Olivier Adam

Policier, Roman noir

Date de lecture : 5-6 juil. 2024

J’ai beaucoup aimé ce roman, qui se passe dans un village, au bord du lac d’Annecy. Un village où tous les habitants se connaissent, où les rumeurs vont bon train, où le point de ralliement est bien souvent le Café des Sports. Et il s’en passe des choses dans ce Café ! On y refait le monde, on parle des uns et des autres, on y passe des soirées à boire et à danser. Mais le lendemain d’une de ces soirées, une jeune femme est retrouvée morte au bord du lac. Qui est-elle ? Chacun a sa petite idée, de la victime comme du coupable. Un événement tragique qui va venir chambouler toutes ces existences bien huilées et faire voler en éclats la tranquillité de façade de cette petite bourgade. Il n’y aura désormais plus personne pour oser dire que « il ne se passe jamais rien ici ».

Dans ce roman choral un peu particulier, nous allons entendre plusieurs personnages, qui vont répondre aux questions des enquêteurs. Ce qui est original, c’est que nous n’entendons jamais les questions, seulement les réponses. Alors que les interrogatoires se succèdent, on découvre des pans de l’histoire, des témoignages divergents ou convergents, des secrets et des révélations, des doutes ou des certitudes, et on se dit que c’est quand même un sacré bordel ces villages ! Je le sais, j’en habite un. Dans le mien, c’est pas le Café des Sports mais la boulangerie et son petit attroupement matinal, chacun sa baguette à la main et lou capèt sur la tête, à se raconter les dernières nouvelles du front. Fin de la parenthèse.

Cela étant, notre lien principal reste Antoine. Antoine, c’est ce gars sympathique mais un peu perdu, qui à trente-huit ans vit encore comme un adolescent, change de boulot comme de chemise, et loue un des nombreux studios appartenant à ses parents. Même sentimentalement, il a réussi à tout rater. Marlène l’a quitté peu avant la naissance de leur fils, parce qu’il a trouvé le moyen de la tromper avec Fanny, son amour de jeunesse, ou plutôt son amour de toujours. Car Fanny et Antoine, ça a toujours été « Je t’aime, moi non plus ». « Tout le monde au village savait qu’eux deux c’était une grande histoire chaotique et impossible. Du genre « ni avec toi, ni sans toi ». » Mais Antoine, impossible de ne pas s’attacher à lui ! C’est vraiment un type gentil, sensible, entier. Il est juste un peu paumé. Et quand on regarde d’un peu plus près, on comprend pourquoi. Il est un peu le vilain petit canard d’une famille patriarcale dans laquelle il n’a jamais trouvé sa place, où l’argent et la réussite comptent plus que le reste. « […] ce type, ça se voyait à des milliers de kilomètres qu’il était brisé, largué, déchiré, qu’il n’avait plus la moindre armure, le moindre soupçon de carapace ».

J’ai adoré le style de l’auteur, sa façon de raconter, ces mots et ces pensées qui digressent, comme poussés par le regard muet des enquêteurs. J’ai adoré l’ambiance, la fin de la saison touristique, le calme qui réinvestit les lieux, et la routine qui s’installe.

Il ne se passe jamais rien ici est un roman qui m’a totalement conquise. Un roman qui tient presque du roman noir social, où l’auteur aborde des thématiques très intéressantes de manière très juste, telles que la vie en milieu rural, les relations intra-familiales, mais aussi les violences faites aux femmes. Un roman que j’ai trouvé plein d’humanité et émouvant. Une belle surprise, à découvrir sans aucun doute !

Infos & Quatrième de couverture

Il ne se passe jamais rien ici d’Olivier Adam
Éditeur : Flammarion – Parution : 01/05/2024 – 368 pages – ISBN: 9782080441775

La saison touristique touche à sa fin dans ce village niché sur les rives du lac d’Annecy. Comme souvent, Antoine passe la soirée au Café des Sports avec les habitués. L’atmosphère est à la fête. Mais quand, au petit matin, on découvre le corps d’une femme assassinée au bord de l’eau, c’est vers lui que se portent les regards. Connu de tous, jugé instable par beaucoup, y compris par sa propre famille, ce bientôt quadragénaire aux airs d’éternel adolescent fait vite figure de coupable idéal. Sans doute un peu trop. Car, ce soir-là, ils sont nombreux à être partis tard dans la nuit. Dans ce roman redoutable empruntant au genre du roman noir, Olivier Adam donne la parole à tous les protagonistes de l’affaire et fait l’autopsie d’une communauté où sont tapis la violence des hommes et leurs silences.

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Cet article a 15 commentaires

  1. Mathilde

    Tout comme Ludivine, j’ai lu « La tête sous l’eau ». Et j’ai l’impression qu’on retrouve un peu une ambiance similaire dans le livre que tu nous présentes ; je me laisserais bien tenter !

  2. Je note tout de suite ce roman de cet auteur que je n’ai encore jamais lu. Merci Caroline pour cette très belle critique.

    1. Caroline

      Une très belle découverte pour ma part, un roman original, des thématiques intéressantes et une tournure inattendue. Franchement, je recommande !

  3. Ludivine

    J’ai lu uniquement La tête sous l’eau de cet auteur, qui se déroule en Bretagne et que j’ai trouvé très touchant. Celui-ci a l’air sympa aussi, le décor est plaisant et c’est assez atypique cette manière de ne présenter que les réponses des personnages lors de l’enquête. Petite parenthèse, tu partages très bien l’image du petit village, ça m’a fait rire. 😁 Je suis surprise que le personnage de ce roman s’appelle aussi Antoine, c’était le cas pour le personnage principal du roman que j’ai lu. Peut-être y a t-il un lien, mais la famille ne semble pas être là même, peut-être un clin d’oeil personnel de l’auteur. Tu m’as donné envie d’en savoir plus avec ta chronique, j’y penserai quand j’aurais envie de lire un autre de ses livres. 🙂

    1. Caroline

      Je suis allée voir le résumé de La tête sous l’eau, et je me le note direct, je sens que je vais aimer. Oui, la référence à mon p’tit village c’est cadeau ! 🤣 Pour le prénom du personnage (qui dans ce livre m’a énormément touchée), ça me fait penser à Francis Veber qui a toujours un François Pignon dans ses films. En tout cas, c’est un roman qu’on peut qualifier de policier, à cause de l’enquête, mais qui pour moi relève davantage du roman noir et c’est ce qui m’a plu. Cette façon d’analyser les gens, les lieux, la vie. Bref, chouette découverte !

      1. Ludivine

        Je ne connaissais pas cette anecdote sur les films de Francis Verber, je n’en ai pas vu beaucoup mais je ferais attention quand j’en reverrais un 😉 J’espère que tu aimeras La tête sous l’eau en tout cas, je pense qu’il pourrait te plaire. 🙂

    1. Caroline

      C’était pareil pour moi, et quelle belle découverte j’ai faite ! Je pense que je vais lire d’autres romans de lui très vite.

  4. Pat0212

    J’ai lu unn autre roman de cet auteur et je l’avais beaucoup apprécié, je note celui-ci qui devrait beaucoup me plaire,

    1. Caroline

      J’ai lu que son premier roman est Je vais bien, ne t’en fais pas qui je crois a été adapté en film. En tout cas, j’adore son style d’écriture.

  5. Hedwige

    Tes articles sont un régal à lire, Caroline ! Je n’ai jamais lu cet auteur dont j’ai pourtant vu le nom passer depuis bien des années.
    C’est une belle occasion de le découvrir que tu nous offres là, merci !

    1. Caroline

      Merci Hedwige !☺️C’est un auteur que je ne connaissais pas et que j’ai découvert par hasard dans le catalogue de ma médiathèque numérique. Franchement, une belle découverte !

  6. Ce roman est dans ma pal et il me tarde de le découvrir ! Merci pour tes mots !

    1. Caroline

      J’ai vraiment bien aimé. Je l’ai trouvé original et puis j’aime ce mélange d’enquête et de roman noir.

  7. Un roman dans lequel il semble se passer beaucoup. Le procédé est original et intrigant et le côté roman noir social a l’air percutant. Merci pour la découverte.

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