Jacaranda de Gaël Faye
Contemporain
Date de lecture : 26-27 sept. 2024
« Tu y crois ?
— À la réconciliation et au pardon ? Non… Je suis une survivante. J’ai vu comment ces gens se sont comportés. Mais les procès sont absolument nécessaires pour les générations d’après. Pour Stella et toi. Grâce à ce que l’on fait aujourd’hui, vous arriverez à cohabiter avec leurs enfants. C’est mon espoir. »
Milan est un adolescent français des années 1990, qui ne s’est jamais vraiment interrogé sur ses origines et surtout sur celles de sa mère, née au Rwanda. Il faut dire que cette dernière reste très secrète sur son histoire, pour ne pas dire mutique dès qu’il s’agit d’aborder le sujet. Mais tout change lorsqu’en 1994, ses parents vont héberger Claude, un jeune Rwandais a « l’air absent » et au « regard apeuré », avec une blessure au crâne. Tous deux vont finir par se lier d’amitié, jusqu’au jour où Claude repart dans son pays. Quatre ans plus tard, pendant les vacances d’été, Milan accompagne sa mère au Rwanda et découvre ses racines, sa famille et une partie de son histoire, mais aussi de celle du pays.
J’ai beaucoup aimé découvrir le Rwanda avec les yeux de Milan, rencontrer avec lui ces personnalités qui marqueront son existence, Claude, Sartre et Stella particulièrement. Stella est une personnalité extraordinaire. J’ai été touchée par son amour infini pour ce « gigantesque arbre aux fleurs violettes », sur lequel elle est sans cesse perchée, « tel un moussaillon juché au sommet d’un grand mât ». J’ai aimé sa relation avec grand-mère Rosalie, vieille femme centenaire, rare personne à avoir connu la naissance de l’hostilité entre les Tutsis et les Hutus.
« Avec ce texte, le poison de la division et de l’ethnisme habilement distillé par les colons belges et l’Église devint la prison mentale dans laquelle la grande majorité des Rwandais se laissèrent enfermer et dont ils ne sortiraient plus. »
Alors que les pages et les années défilent, on plonge avec une vive émotion dans l’histoire du Rwanda, marquée par la discrimination envers les Tutsis. Une haine qui a véritablement pris sa source dans les années 1950, par la faute des colons, et qui a perduré de façon dramatique jusqu’à conduire au génocide de 1994. Un cycle de vengeance sans fin, qui m’a touchée en plein coeur. « Kwibuka ». J’ai été bouleversée par les témoignages, notamment celui d’Eusébie, au stade, qui m’a marquée durablement. J’ai admiré son courage et sa dignité, alors que mon esprit tentait d’assimiler ses paroles et que les images de ce qu’elle a vécu me submergeaient.
« C’est lui qui m’a sauvé puis m’a recueilli pendant le génocide. C’est le grand frère des orphelins. Tu as vu, chez lui c’est le palais des mayibobo, la maison des enfants de la rue, le refuge des gamins abandonnés. Il prend soin d’eux, les protège. »
Pourtant, Jacaranda est aussi un roman plein de force et d’amour. Il raconte les liens indéfectibles qui se tissent et les moments d’amitié intenses, les sourires et les rires. Il raconte aussi la solidarité qui peut se créer parfois, comme dans le Palais de Sartre, refuge pour les enfants de la rue dans lequel règne une effervescence presque joyeuse.
Jacaranda est un roman que j’ai trouvé plein de poésie, à la fois bouleversant et porteur d’espoir. Un livre magnifique, admirablement raconté, de ceux qui laisseront leur empreinte à vie dans mon coeur de lectrice.
Découvrez d’autres avis sur ce livre : Cannetille, Nath, Belette, Frédéric, Aude, Athalie, Patricia, Yvan (Sin City), Cécile (Pamolico).
Infos & Quatrième de couverture
Jacaranda de Gaël Faye
Éditeur : Grasset – Parution : 14/08/2024 – 288 pages – ISBN: 9782246831457 .
Également disponible : 🎧 En audio chez Audiolib, 2024.
Quels secrets cache l’ombre du jacaranda, l’arbre fétiche de Stella ? Il faudra à son ami Milan des années pour le découvrir. Des années pour percer les silences du Rwanda, dévasté après le génocide des Tutsi. En rendant leur parole aux disparus, les jeunes gens échapperont à la solitude. Et trouveront la paix près des rivages magnifiques du lac Kivu.Sur quatre générations, avec sa douceur unique, Gaël Faye nous raconte l’histoire terrible d’un pays qui s’essaie malgré tout au dialogue et au pardon. Comme un arbre se dresse entre ténèbres et lumière, Jacaranda célèbre l’humanité, paradoxale, aimante, vivante.
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Très joli retour sur ce livre que je n’oublierai sans doute jamais…
Que j’ai aimé ce roman. 🤩
Je comprends ! Pour ma part, j’ai découvert l’auteur avec celui-ci et j’en suis ravie !
Je partage totalement ton point de vue Caroline. C’est un roman avec deux facettes, les crimes commis lors du génocide, cette horreur absolue et d’un autre côté une profonde humanité, l’amitié, l’amour, la découverte de ses racines. J’étais ému après avoir achevé cette lecture marquante à plus d’un titre.
Il me reste à lire Petit Pays maintenant, car je suis certaine que je vais l’adorer !
Comme tu l’as vu, j’ai manqué d’enthousiasme pour ce roman, je l’ai trouvé un peu trop didactique.
Merci pour ton avis sur ce roman qui semble poignant.
C’est vrai qu’il est poignant à certains moments, notamment quand tu découvres les témoignages, mais il est aussi très beau je trouve.
J’ai beaucoup aimé ce roman de Gaël Faye, tout en poésie, douceur et horreur… tout comme « Petit Pays ». J’aime sa façon délicate de nous dire les choses… Merci pour ta chronique !
La même amie qui m’a prêté Jacaranda m’a prêté Petit pays. J’espère l’apprécier tout autant, mais je n’en doute pas !
Ce roman a beaucoup de succès, il a l’air vraiment touchant mais avec un sujet comme celui-ci, ça se comprend. Et en même temps, tu sembles avoir trouvé de belles touches de lumière dans cette sombre époque. Merci pour cette belle chronique Caroline 🙂
Oui, il parle d’un sujet très dur mais il est plein d’espoir je trouve !
J’ai adoré ce roman aussi !
Je comprends ! C’était mon premier de l’auteur et je compte bien lire Petit pays maintenant, qui m’attends sagement dans ma bibliothèque !
Ce roman est dans ma PAL audio, il attend sagement derrière ses congénères. Merci pour ton superbe retour !
J’imagine qu’en audio il doit être encore plus émouvant !
Je vais finir par me laisser convaincre même si je ne connais que trop cette terrible page d’histoire !
Je comprends ! Mais c’est un beau roman !
Oh tu l’as lu, et tu as été ému, pourquoi je ne suis pas étonné chère Caroline. 😉
Merci à toi pour ce beau retour de lecture. 😀
Oui, je l’ai lu en septembre dernier, mais je suis trèèèèès en retard dans mes chroniques !☺️
ça je peux le comprendre, c’est pareil ici !
Pas d’écoute en audio pour toi ? Ça, ça m’étonne 😉
Mais oui, c’est un très joli texte
Oui, une copine me l’avait prêté, et puis, je suis toujours un peu frileuse quand ce sont les auteurs qui lisent leur livre (sauf rares exceptions).